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D’où vous est venue l’idée de ce réveillon foutraque ?

Bertrand Burgalat. Ca fait longtemps que j’entends dire qu’il n’y a plus de place pour la musique à la télévision. Du coup, j’ai passé quelques années à essayer de rebattre les cartes avec des projets d’émission abordant la musique sous des angles différents, plus sociologiques. J’avais fini par tirer un trait sur mes velléités, et puis en novembre je me suis dit que c’est souvent quand on se décourage que les choses peuvent se débloquer. J’ai appelé Paris Première en leur proposant de faire quelque chose pour le réveillon et ils ont accroché.

Benoit Forgeard. Bertrand m’a alors contacté et l’idée m’a immédiatement plu, simplement parce qu’une émission du réveillon, c’est fondamentalement quelque chose qu’on ne voit pas tous les jours. C’est à la fois codifié et ouvert à toutes les élucubrations, ce qui est très pratique pour l’imagination.

BB. Benoit a écrit très vite un découpage et des dialogues, on a eu leur feu vert début décembre. On a tourné les musiques en deux jours et les scènes de comédie deux autres jours, ensuite Benoit a fait un travail dément de montage et de trucages, l’émission était prête pour le 31 mais c’était trop tard pour qu’elle apparaisse dans les programmes, on a donc décidé de la diffuser officiellement le 31 janvier.

Comment s’est faite la rencontre entre vous, Bertrand, et vous, Benoit ? Peut-on dire que c’est avant tout la rencontre entre une partition et une caméra ?

BF. C’est surtout la rencontre du sucre et du sel. Bertrand est diabétique, tandis que je suis, pour ma part, un incorrigible bavard. Plus prosaïquement, je trouve l’univers des chansons de Bertrand très cinématographique. On dit ça souvent des compositeurs, mais dans son cas, c’est particulièrement justifié. Il y a quelques années, j’avais découvert des films épatants (Bedazzled de Stanley Donen, Elle est des nôtres de Siegrid Alnoy) grâce à lui et une carte blanche qui lui avait été donnée sur une chaîne du câble. De mon côté, la musique occupe une part importante dans mes films.

BB. Je suis heureux que mes projets précédents n’aient jamais pu se concrétiser car ils auraient été beaucoup moins bien sans Benoit. On s’est rencontrés cet automne à une émission de Radio Sciences-Po animée par Blandine Rinkel et Pierre Jouan (Blandine joue 2012 et 2019 dans l’émission, Pierre fait le scientifique et le reporter). C’est comme ça que j’ai découvert ses films, qui m’ont époustouflé. Ils ne ressemblent à rien de ce qu’on connait, il y a chez lui une façon d’aborder le monde numérique avec poésie.

BF. Vous l’avez remarqué, Bertrand et moi avons au moins un point commun : nous détestons lancer des fleurs. Même si chacun a sa spécialité, notre collaboration se situe donc plutôt au confluent. D’ailleurs, si « l’Année Bisexuelle » devait être une émission de débat hebdomadaire, elle s’appellerait « Confluences ».

Qu’aviez-vous en tête au moment du levé de caméra ? Au final, content du résultat ?

BF. Au levé de caméra, pas grand chose en tête. C’est plutôt au couché que les idées viennent.

BB. Il y avait la volonté de rompre avec certaines habitudes du genre (éclairages en semi-pénombre, caméras multiples, montages épileptiques, flight-cases apparents etc) et de tourner le manque de moyens à notre avantage, en utilisant les contraintes de façon créative. Il y a eu beaucoup de bienveillance et de dévouement autour de ce tournage, je pense notamment à Pierre Maillard, de Parfum de Films, ou à Jean-Pierre Kalfon. Paris Première ont été parfaits, ils n’ont pas cherché à reformater le projet ou à lui faire perdre ses côtés les plus déroutants. A cet égard je tiens à m’excuser auprès du public pour mon jeu de comédien, qu’on pourrait aimablement qualifier de bressonien…

Il plane sur cette « Année bisexuelle » comme un parfum de production télévisuelle digne de l’ORTF, un lointain souvenir de cette époque où la télé française osait l’improbable pour étonner le spectateur. Etes-vous nostalgique de ce mode de production à la Jean-Christophe Averty ?

BB. Pas nostalgique non, même si ce serait chouette que le courrier des lecteurs de Télé 7 Jours reçoive autant de lettres de protestation qu’il lui en parvenait après les diffusions des Raisins Verts d’Averty! J’ai toujours pensé que pour aller vraiment de l’avant il ne faut jamais masquer ses influences, les choses qui m’ont marqué avec la musique à la télé ça va des vignettes de Garrel pour Bouton Rouge aux films de Reichenbach, mais le téléspectateur pourra aussi déceler dans notre programme quelques clins d’oeil à Michel Drucker ou à Christophe Hondelatte, et je suis sûr que Benoit a des influences très différentes.

BF. Ce qui m’intéresse et m’amuse, c’est de tenter de mettre en images un récit, ou bien une chanson, des musiciens jouant en direct. Comme Bertrand avait vu mes films, il n’a pas été surpris de me voir aller vers un style très composé, où l’on change peu de plans, mais où la diversité s’installe via incrustation, superposition, jeux de formes ou de couleurs. L’influence de Jean-Christophe Averty, dépositaire de cette voie à la télévision, est évidemment manifeste, mais c’est plus largement une influence qui vient des arts plastiques, une façon d’envisager l’écran comme une surface à peindre.

BB. Ce qui nous semblait important aussi c’est de n’être ni élitistes ni condescendants, encore moins branchouilles mais d’essayer de faire une émission de service public idéalisée, tournée avec les contraintes du privé, c’est-à-dire moins de 8% d’une émission comparable sur le Service Public.

Sans comparer – et bien au contraire – votre programme musical à ceux déjà en place sur les grandes chaines françaises, à qui s’adresse ce programme selon vous ?

BF. Je ne vois personne qui puisse en être dispensé. Amateurs de musique, de couleurs, fans de sciences, de sports mécaniques même (une voiture de collection déambule dans Paris sur un solo d’orgue d’église), tous peuvent y trouver leur compte.

BB. Oui, il se place à mi-chemin entre les émissions de Jean-François Zygel et celles de Patrick Sébastien.

BF. Faute de temps, il n’y a guère que la météo et le cours de la bourse qui n’ont pas droit de cité dans l’Année Bisexuelle.

BB. C’est vrai, il y a même une séquence où on voit des chaussures.

Comment s’est faite la sélection musicale ? Avez-vous eu recours au playback pour certain des invités ?

BF. la programmation est essentiellement le fait de Bertrand, qui a choisi les artistes avec la minutie d’un sommelier.

BB. Nous avons essayé de mélanger les styles et les artistes populaires (Marc Lavoine) et impopulaires (moi), jeunes, vieux (moi encore), classique (le concertiste Thierry Escaich qui improvise à l’orgue), ou expérimentaux (Chassol qui harmonise nos dialogues). Tous sont venus et ont joué le jeu alors que ça n’avait rien de confortable : toutes les musiques et les chansons sont jouées et filmées en direct, à l’exception de Marc Lavoine qui était en tournage à Prague et que Benoit a filmé au Palais de la Découverte avec le playback sur les haut-parleurs d’un ordinateur portable. Ce qui était rageant car il chante vraiment bien!
Au départ on souhaitait enregistrer l’ensemble de l’émission au Palais de la Découverte mais c’était très compliqué, il nous aurait fallu tourner la nuit, démonter tous les matins etc. Du coup, Benoit a installé un fond vert au studio Ferber, on a demandé aux musiciens de jouer le plus serré possible pour que tout le monde puisse apparaitre dans le cadre. Pour aller vite et dégager la vue il n’y avait pas de circuit de retours, juste un haut-parleur pour la voix et les amplis des musiciens. Les plans de Benoit sont d’une telle pureté qu’on dirait presque que c’est du playback alors que c’était très contraignant pour les musiciens de jouer en direct sans le confort habituel des retours et de l’espace… Mais je pense qu’on se rend compte à quel point les Dragons sont des musiciens exceptionnels, je ne connais pas beaucoup de sections rythmiques qui jouent sans broncher Land of a 1000 Dances au tempo dément de Little Richard…

BF. Nous nous sommes entourés uniquement de musiciens et musiciennes que nous respectons et aimons, quel que soit leur domaine d’activité. Pour Bertrand comme pour moi, il aurait été difficile de travailler avec des gens que nous n’apprécions pas. De surcroît, c’eut été gourmand en énergie et nous n’avions que peu de batteries.

Benoit, quelle est votre grande résolution pour 2013 ? Et Bertrand ?

BF. Sans vouloir présumer de la réponse de Bertrand, je crois que nous sommes parfaitement résolus à ce que l’Année Bisexuelle soit un succès, et son concept, décliné dans le monde entier. Au-delà de ça, et pour paraphraser ce qui se dit dans l’émission, nous suivrons l’année 2013 avec attention, et nous veillerons à vivre chacun de ses jours avec le plus grand soin.

BB. Je vais avoir 50 ans cette année, alors j’aimerais ne pas être trop fatigué en 2019, on mise beaucoup sur cette année…

BF. Cet été, je vais m’appliquer à tourner mon second film, « Gaz de France », avec le comédien Darius, notamment, qui joue dans « L’Année Bisexuelle ».

Envie de remettre le couvert pour de nouvelles parties de jambe en l’air pas très cathodiques ?

BF. Les termes de votre question laissent sous-entendre une allusion grivoise. Je vous arrête tout de suite : vous êtes en plein dans le mille. Pourquoi ne pas le reconnaître ? l’Année Bisexuelle a été une partie de plaisir. Nous refermons l’expérience, convaincus de la nécessité de nous revoir. Du moins à la télévision.

BB. Oui ce serait chouette de pouvoir en faire d’autres, avec un peu plus de temps et un peu plus de moyens pour pouvoir mieux payer tout le monde, mais en restant en équipe légère.